Aucune des méthodes présentées ci-dessous ne permet l’élimination du varroa, mais elles peuvent contribuer à une réduction significative de son abondance, en combinaison ou non avec des traitements médicamenteux.

Ces méthodes exploitent les caractéristiques biologiques et leur efficacité peut varier en fonction de la saison, de l’état de la colonie et du niveau d’infestation. La quantification régulière du varroa s’avère nécessaire afin d’optimiser le moment et le type de traitement.

La quantification de varroa peut se faire selon deux principes : d’une part, le comptage des chutes de varroa suite à des morts naturelles ; d’autre part, le comptage des varroas présents sur les abeilles.

 

Quantification du varroa

 

Chutes naturelles

Ce type de comptage est facile à réaliser mais comporte des points critiques. Ainsi, un bon comptage doit se faire chaque jour pendant 2 à 3 jours d’affilée, afin d’avoir la meilleure représentativité de la situation. A cet effet, des langes ou plateaux recouverts de graisse pourront recueillir les acariens tombés.

Le développement de l’acarien étant fonction de celui de l’abeille, le nombre d’acariens comptés indiquera une gravité de la situation suivant la période de la saison.

Avril à juin Juillet Août et septembre
Infestation de faible niveau < 2 chutes/j 4 à 8 chutes/j < 4 chutes/j
Infestation de niveau moyen 4 à 8 chutes/j 6 à 10 chutes/j > 4 chutes/j
Infestation de haut niveau > 8 chutes/j > 10 chutes/j > 4 chutes/j

 

Comptage des varroas phorétiques

Cette méthode de comptage estime le nombre de varroa présents sur une certaine quantité d’abeille. Pour ce faire, les acariens seront séparés des abeilles par du sucre glace, de l’alcool, de l’antigel ou en les anesthésiant avec du CO2. Une quantité équivalente à 100 abeilles sera utilisée (des contenants standards sont facilement trouvable dans les commerces ou peuvent être fabriqués).

Ensuite, les parasites récoltés seront dénombrés et 3 cas de figures peuvent en résulter :

  • infestation de 5 % (5 varroas pour 100 abeilles) : colonie faiblement parasitée, pas de traitement nécessaire dans l’immédiat
  • infestation en 5 et 10 % : un traitement médicamenteux doit être planifié
  • infestation au delà de 10% : un traitement est urgent

3 remarques importantes :

  1. les comptages au sucre glace et au CO2 ne sacrifient pas les abeilles, celles-ci sont réintroduites dans la ruche par après. L’emploi d’alcool ou de liquide lave-glace tue les abeilles sur lesquelles le test est réalisé
  2. le produit utilisé pour la récolte des parasites n’influence pas les valeurs seuils
  3.  on peut estimer qu’à partir de 3 % de varroa, il y a une baisse de production moyenne de 5 kilos de miel à la ruche

 

Les méthodes biotechniques de lutte contre le varroa

 

Plateau grillagé

Les chutes de varroa lors de leur passage de l’abeille vers la cellule et inversement sont fréquents. Ainsi, la mise en place d’un plateau grillagé (maillage le plus fin laissant passer varroa) dans le fond du corps de ruche empêche les acariens qui tombent de revenir dans la ruche.

 

Destruction du couvain mâle

Les femelles varroa déposent leurs œufs préférentiellement dans le couvain mâle. Ces cellules, plus grandes, et leur plus longue durée d’operculation favorisent la multiplication du parasite.

La pose de cadres dits à mâles (cadre à bâtir sans amorce ou dont les amorces alvéolaires sont plus larges) va induire la construction d’alvéoles de couvain mâle dans lesquelles la reine dépose des œufs de mâles. Les femelles varroa y pénètrent préférentiellement et s’y font enfermer lors de l’operculation. Les cadres doivent être retirés maximum 21 jours après leur pose, avant l’émergence des premiers faux-bourdons.
Cette technique constitue un bon piégeage du parasite et peut être mis en place dès avril-mai sur les colonies les plus fortes.

 

Encagement de la reine

Comme la reproduction du varroa dépend de la présence de larves, toute intervention freinant ou retardant la ponte va ralentir la prolifération du parasite. Ainsi, l’encagement de la reine (mise en cagette de celle-ci au niveau du centre du corps de ruche, où les ouvrières la nourrissent et où elle pourra diffuser ses phéromones) va durer 24 jours (durée d’éclosion des faux-bourdons), et interrompre la reproduction de l’acarien. Par après la reine est libérée.

En l’absence de couvain fermé, tous les varroas présents dans la ruche seront dès lors exposés à une application one-shot d’acide oxalique (les varroas présents dans les cellules operculées ne sont pas exposés à l’acide oxalique).
Cependant, au vu de la perte de couvain engendrée et compte-tenu d’une moyenne de 8 semaines pour récupérer un niveau de couvain satisfaisant, cette technique doit être évaluée en fonction du climat et des miellées, avec de meilleurs effets en juillet.

De plus, elle ne pourra se faire que sur des colonies suffisamment fortes pour supporter ce retard de ponte.

 

Retrait partiel du couvain

Le but ici est de piéger varroa dans du couvain operculé et de retirer celui-ci. La technique s’étale sur une durée de 36 jours.

À T0, un cadre de couvain, vide et déjà bâti, est encagé complètement (comparable à une grille à reine qui entourerait le cadre totalement) et la reine est placée dans cette « cage ».
À T+9, la reine est déplacée sur un 2e cadre, vide et bâti, lui aussi encagé de la même manière que le premier. Le premier cadre encagé est toujours présent dans le corps de ruche.

À T+18, la reine est déplacée sur un 3e cadre, vide et bâti, lui aussi encagé de la même façon. Le premier cadre, qui sera désormais operculé, est retiré de la ruche.

À T+27, la reine est libérée dans le corps de ruche et le 2e cadre est retiré.

À T+36, le 3e cadre est enfin retiré.

Les cadres retirés de cette façon peuvent être détruits ou, lorsque plusieurs ruches sont soumises à ce traitement en même temps, ils constitueront des essaims artificiels qui pourront être traités à l’acide oxalique.

Il est obligatoire de respecter le timing pour réussir cette méthode. Elle sera donc à réservée aux apiculteurs expérimentés.

 

Retrait total du couvain

Cette méthode simule un essaimage et produit des essaims nus faciles à traiter à l’acide oxalique. Cette méthode n’interfère pas avec la ponte de la reine et peut-être combinée à la production de ruchettes.

Début du mois de juin, les colonies les plus fortes sont sélectionnées pour y élever des reines qui serviront à remérer les ruchettes produites.

Tous les cadres de couvain des ruches sont retirés. Un cadre bâti neuf et propre, est placé au centre du corps de chaque ruche. Un cadre à mâle viendra compléter l’ensemble et la colonie se retrouvera sur 6 cadres. Les emplacements disponibles seront comblés avec des cadres à bâtir, si la miellée subsiste, ils seront rapidement bâtis, sinon, il sera nécessaire de nourrir la colonie.

Lors du retrait des cadres de couvain, il faudra les secouer ou les brosser pour laisser la majorité des ouvrières dans le corps de ruche tout en gardant au moins 300 abeilles par face pour s’occuper des larves présentes sur ces cadres. Le couvain et ses nourrices sont transférés en ruchette et donneront naissance à des essaims nus 21 jours plus tard.

La reine doit rester dans la ruche.
On contrôlera la colonie 7 à 10 jours après la manipulation, les cadres neufs seront bâtis et la reine aura recommencé à pondre. En l’absence de couvain fermé, la colonie sera traitée à l’acide oxalique. Le cadre à mâle sera retiré et détruit 21 jours après son introduction.

De nouvelles reines sont introduites dans les ruchettes de sorte que la ponte ne débute qu’après l’éclosion de l’entièreté de l’ancien couvain, 21 à 24 jours après son transfert. Un acide oxalique sera alors appliqué en l’absence de couvain fermé, avant l’operculation du nouveau couvain.

Au vu de la production d’ouvrières que cette technique demande, le nourrissement est nécessaire.

 

Stimulation de la résistance des colonies au varroa

 

Rajeunissement des reines

La ponte des reines diminue à partir de la 3ème année. Remplacer la reine tous les 2 ans permet de maintenir une colonie plus forte et plus résiliente à la présence du varroa.
Il est donc conseillé de remplacer les reines de plus de 2 ans, que ce soit par introduction de cellules royales ou de reines encagées.

 

Nourrissement

Ici aussi, on s’oppose à l’affaiblissement de la colonie.
Lorsqu’on parle de l’alimentation des abeilles, il y a 3 éléments à prendre en compte : l’eau, le pollen et le miel.
Une source d’eau est essentielle, que ce soit lors de forte chaleur (thermorégulation) ou bien à températures plus basses pour dissoudre un miel cristallisé. Un abreuvoir d’eau potable à proximité du rucher est essentiel.

Le pollen est la source de protéine de l’abeille qui le stocke en pain d’abeille et sert à la préparation de la gelée royale. Une grande variété de pollen donne une meilleure immunité des larves. Ce point doit être pris en compte lors de transhumances mono-florales.

Enfin, le sucre sous forme de miel ou de sirop de nourrissement est une source d’énergie essentielle à la survie des abeilles. Le manque de sucre conduit à un affaiblissement rapide de la colonie. Le nourrissement doit être envisagé lors de l’hivernage, de pluie prolongée ou de division de colonies.

 

Choix de la race

Si nos abeilles européennes n’ont pas encore la même tolérance face à varroa que sa cousine asiatique (Apis cerana parviendrait à s’épouiller), certaines races apicoles semblent plus ou moins sensibles à l’acarien. Ainsi, la Buckfast est plus vulnérable au parasite probablement en raison d’une agressivité moindre. À l’inverse, la race noire et d’autres races méditerranéennes se défendraient mieux.

Dans tous les cas, le choix d’une race doit se faire en fonction de l’environnement et du capital génétique de la région considérée.

 

Les perspectives de recherches

 

Varroa Specific Hygiene

C’est la fameuse résistance à varroa. En effet, il a été observé que certaines variétés d’abeilles semblent mieux se défendre contre varroa, et ce, sans intervention humaine.
En pratique, la tolérance à varroa s’appuie sur 2 gènes.

  1. La capacité des ouvrières à détecter varroa sous l’opercule : une fois détecté, l’ouvrière perce un petit trou dans l’opercule pour signaler la présence de l’acarien
  2. La capacité d’autres ouvrières à reconnaître les trous dans l’opercule, à vider et à nettoyer la cellule de son contenu : ceci cause la mort des larves de varroa mais n’affecte pas la reproductrice

Ces caractères génétiques résultant de sélection naturelle ou artificielle mettront un certain temps avant de se généraliser, étant donné la présence de 2 gènes distincts et la difficulté de contrôler la fécondation des reines.